Communiqué
Médecine et justice : qui fait la loi ?
30 septembre 2011
Les délicats rapports entre médecins et autorités sont au cœur de la dix-huitième Journée de droit de la santé qui se tient ce vendredi 30 septembre à l’Université de Neuchâtel. Médecine en milieu carcéral, affaire Rappaz, il est des cas où praticiens et autorités judiciaires sont condamnés à s’entendre, alors que les bases mêmes de leurs arts respectifs peuvent diverger. Organisée par l’Institut de droit de la santé (IDS), la rencontre fait salle comble. Elle s’adresse à un vaste public cible, allant des avocats jusqu’aux professionnels de la santé, en passant par des assureurs, ou encore des administrateurs d’établissements sanitaires.
En 2010, la grève de la faim du chanvrier Bernard Rappaz avait débouché sur une impasse juridico-médicale qui se heurtait au refus des médecins d’appliquer une décision judiciaire visant à nourrir de force une personne qui, en toute conscience, refusait de s’alimenter. L’affaire avait clairement mis en évidence une incompatibilité entre éthique médicale et décision d’un tribunal.
« En principe, médecin et juriste assument chacun des responsabilités et exercent des compétences qui leur sont propres, clairement identifiables, » souligne le professeur Dominique Sprumont, directeur adjoint de l’IDS. Il existe cependant de nombreuses interactions entre médecins et juristes, débouchant parfois sur des tensions.
Et le professeur de droit de s’interroger : « Les médecins peuvent‐ils dès lors prétendre être au‐dessus des lois en refusant de suivre les directives de l’autorité ? Ou au contraire, n’est‐ce pas l’administration qui dépasse ses prérogatives lorsqu’elle dicte aux médecins l’obligation d’appliquer certains traitements contre la volonté d’un patient ou en violation des règles de l’art médical ? »
Si le pouvoir que les médecins détiennent sur la santé et la vie de leurs patients leur impose de lourdes responsabilités, il implique aussi une certaine indépendance. Certes, les médecins ne sont pas au-dessus des lois, mais ni le législateur, ni le juge ne sont en mesure d’apprécier pleinement la pertinence d’un traitement.
Dans ce cas, comment concilier Etat de droit et responsabilités professionnelles ? Dans quelle mesure un juge peut-il ordonner une intervention médicale, alors que celle-ci est contraire aux règles de l’art et, partant, illicite ? Autrement dit, est-ce que l’Etat peut forcer un médecin à fournir des prestations alors que, médicalement, elles ne sont pas justifiées ?
L’objectif de cette 18e Journée de droit de la santé est ainsi d’instaurer les bases d’un dialogue où chacun pourrait pleinement exercer ses compétences.